En 1982, 1983 et 1984, nous avons suivi l'enseignement que donnait Pierre Dervaux (1917-1992) à l’Académie Internationale d’Eté de Nice.
Un jour, un apprenti-chef d’orchestre, saisi sans doute par une soudaine inspiration d’ordre esthétique, arrêta l’orchestre plutôt bancal qui nous servait de cobaye pour formuler avec délectation une exigence quasi princière qui concernait la pureté de l’intonation.
Pierre Dervaux l’interrompit sans ménagement par un « On a déjà tant de mal avec les fausses notes … si en plus on doit s’occuper des notes fausses … » qui renvoya illico ledit apprenti-chef d’orchestre à des devoirs plus ordinaires.
Nous ne saurons jamais l’intention de Pierre Dervaux dans cette vocifération parfaitement maîtrisée.
Pur dépit ?
Les fausses notes sont une chose simple et il entre dans les devoirs du chef d’orchestre de tenter, par sa vigilance, de les éradiquer.
Les notes fausses sont une chose plus subtile.
Qu’en dire ?
Le violoniste Arnold Steinhard, membre du Quatuor Guarneri, eut comme professeur de violon un certain Peter Meremblum, violoniste russe qui avait été lui-même l’élève de Léopold Auer (1845-1930).
Il raconte* : « Lors d’une leçon que je n’oublierai jamais, j’ai cherché à justifier ma mauvaise intonation par le fait que mon violon était désaccordé ; il s’est alors contenté de le désaccorder encore davantage et a joué parfaitement juste sur mon instrument ».